(Nous retrouvons Nak dans la salle de conférence de l’asile…)

Bonjour à tous ! Dans cette nouvelle chronique, nous allons nous centrer sur un événement particulier dans la vie d’un lutteur. Il est de coutume de dire que les premières fois sont les plus mémorables, eh bien nous allons justement vous conter ici la première prise de titre mondial chez les lutteurs de la WWE.

Pourquoi s’intéresser à ce fait ? Car souvent, lorsqu’un catcheur décroche pour la première fois le précieux sésame, c’est la preuve d’une confiance sans faille des dirigeants.

Souvent, c’est également une étape décisive qui lance définitivement l’heureux élu sous le feu des projecteurs, et en fait une superstar. Parfois c’est un simple coup d’éclat, un sursaut dû à un besoin temporaire ou causé par une « erreur de casting ».
A l’échelle de la fédération, certaines de ces premières fois ont annoncé des changements, une nouvelle tendance.

Il peut donc être intéressant d’établir un parallèle sur la carrière du lutteur avant le gain du titre mondial, sa carrière après ce gain, et en quoi ce règne a-t-il (ou non) contribué à faire l’histoire.

Et aujourd’hui, je cède la parole à mon honorable collègue des enfers, Tombstone, qui va vous faire revivre un moment déterminant de l’histoire du catch car cette chronique est consacrée à…

Alors que Nak ouvre la porte pour laisser entrer Tombstone dans la salle de conf’, rien ne se passe… Il laisse échapper un « Mais il est où ce con ? » avant d’aller dans le couloir. Les Freaks présents commencent à se poser des questions quand un cri de surprise retentit ! Nak entre à reculons dans la salle la bouche entravée ! Stupeur chez les Freaks : une main emmitouflée dans une chaussette de sport plus ou moins blanche car elle n’a pas été lavée depuis longtemps se trouve dans la bouche de Nak !!! WTF ? L’admin’ suffoque et recule encore dans la salle en se débattant comme il peut, c’est alors que l’assaillant est maintenant visible de tous. Il s’agit d’un maniaque de l’asile !

Il porte un collant gris sur le côté duquel on peut lire le mot « Cactus », une chemise blanche aux manches arrachées, une cravate noire constellée de smileys et surtout, il porte un masque bizarroïde en lanières de cuir sur la tête, cachant partiellement son visage. Une tignasse hirsute lui sert de cheveux, il est gros et barbu et il pousse des petits cris de cochon. Nak s’évanouit. Le fou furieux retire sa main revêtue de la chaussette moisie de la gorge de sa victime. Puis il se tourne vers l’assemblée. Il enlève la chaussette et la fourre dans son caleçon avant de lever le bras en l’air en signe de victoire. Quelques applaudissements se font entendre de la part de Clown Bastard, Otaku San ou encore SwantonBomb, tandis que les autres restent stupéfaits. Le forcené forme alors deux pistolets imaginaires avec ses pouces et index avant de beugler un tonitruant « BANG BANG ! »

L’individu retire ensuite son masque, sa perruque, puis le rembourrage qu’il avait autour de la taille.

Les Freaks : TOMBSTONE !

Tombstone : Eh oui, les petits loups, c’est moi ! Aujourd’hui, je vais vous raconter le premier titre mondial de celui qui fut tour à tour Cactus Jack, Dude Love, ou encore Mankind, j’ai nommé The Hardcore Legend, MICK FOLEY !

François : Cool ! C’est super, ça promet un épisode de folie ! Haha !

Les autres Freaks : …

Tombstone : Hum… François tu t’excuses et tu vas au coin.

François : Pardon…

Clown Bastard : Hey ! Y a Nak qui revient à lui !

Tombstone aide l’icône du Nakisme à se redresser. Ce dernier, mal en point, a besoin de s’appuyer contre le bureau pour rester debout. Tombstone en profite pour s’emparer d’une chaise et la fracasse sur Nak qui s’écroule à nouveau.

Tombstone : Bon, assez perdu de temps, entrons dans le vif du sujet !




Pour certains, c’est un cascadeur loufoque, pour d’autres, c’est un brawler d’exception, pour d’autres encore, c’est un dingue qui a pris des risques inconsidérés, ou un génie du catch, ou bien encore un mec complètement timbré qui a les fils qui se touchent ! Une chose est sûre, Mick Foley est un personnage unique en son genre, un homme aux multiples facettes qui a bouleversé le catch mondial en le marquant indélébilement de son empreinte sanguinolente !

Mick Foley est atypique. D’abord, il a réussi à faire son trou dans le catch avec un physique peu orthodoxe, c’est-à-dire sans un corps sculpté tout en muscle, mais plutôt avec de l’embonpoint, et surtout, avec un look de « madman » : barbe et cheveux hirsutes, dents manquantes, et même une oreille en moins ! Ensuite, il a réussi sans avoir une technique et une maîtrise irréprochable de la lutte, en revanche, il avait d’autres atouts dans sa manche, telle qu’une volonté de fer (que dis-je de fer ? D’acier, de titane, d’adamantium !), une capacité à encaisser les chocs hors du commun (ne faites jamais ça chez vous !), un sens de l’humour exacerbé, un esprit brillant et surtout… un petit (gros ?) brin de folie !

Alors je ne vais pas me lancer dans une bio exhaustive et détaillée de Mrs. Foley’s Baby Boy, car il y a beaucoup trop de choses à dire et que ce n’est pas le but de cette chronique. Par conséquent, je vous conseille donc fortement, enfin à ceux qui n’ont pas de problèmes avec l’anglais écrit, de lire le premier livre de Mick Foley, Have A Nice Day : A Tale Of Blood And Sweatsocks (publié en 1999). Cette autobiographie est la meilleure dans le genre, c’est le premier best-seller catchesque (qui ouvrira la voie à bien d’autres autobiographies de catcheurs), très bien classé dans la liste du prestigieux New-York Times. C’est un véritable monument que ce bouquin, écrit sans nègre ou co-auteur en plus, LA référence (avec les livres de Bret Hart et Chris Jericho complétant le podium). Lisez-le, c’est de la bonne !

Néanmoins, voici quelques faits importants avant de revenir sur son parcours à la WWF/WWE :

- Il naît le 7 juin 1965 à Bloomington dans l’Indiana, mais il grandira à Setauket, New-York.

- Il a décidé de devenir lutteur professionnel très tôt, quand il était jeune adolescent mais le déclic final a eu lieu quand il a été au Madison Square Garden de New-York pour assister au match en cage entre son idole Jimmy Snuka et Don Muraco, avec le très célèbre Superfly Splash de Snuka exécuté depuis le sommet de la cage.

- Il a été formé à la DeNucci’s School of Wrestling et a fait ses débuts en tant que lutteur professionnel en 1983, en participant à quelques squash matches sous le nom de Jack Foley, à la WWF, notamment face aux British Bulldogs.

- Il écume la scène indépendante et crée le personnage de Cactus Jack, un heel violent et fou, prêt à toutes les barbaries pour épater la galerie avant tout, plutôt que pour obtenir la victoire (ce qui sera en fait le crédo de Foley à travers toute sa carrière). Il passe de l’UWF à la WCCW en passant par la CWA et surtout la Tri-State Wrestling où il est repéré par les dirigeants de la WCW qui l’engagent.

- Durant son passage à la WCW, de 1991 à 1994, il aura des matchs contre Sting, Abdullah The Butcher, Paul Orndorff mais surtout Big Van Vader ! Ce sont ces combats extrêmement violents pour l’époque face au mastodonte qui vont marquer les esprits pour le meilleur (des matchs excitants et de bonne qualité) mais aussi pour le pire : les dirigeants de la WCW sont choqués par la violence déployée par les deux hommes dans leur premier combat en PPV (un Texas Deathmatch à Halloween Havoc 1993) et refusent d’inclure Foley vs Vader dans un PPV à l’avenir ! Les deux hommes s’affrontent néanmoins en house show et c’est à Munich, en 1994, lors d’une tournée que les deux hommes s’affrontent pour un dernier match…

- … match dans lequel Foley perdra une oreille ! En effet, au cours du combat, Foley avait prévu d’exécuter un « Hangman », c’est-à-dire un spot où le catcheur a la tête coincée entre la 2ème et la 3ème corde qui se sont emmêlées autour de son cou, de sorte qu’il est « pendu ». Normalement, cela est sans grand danger… sur un ring normal avec des cordes normales… Le problème, c’est qu’à la WCW, les cordes étaient d’anciens câbles d’ascenseur recouverts de caoutchouc, les catcheurs se plaignaient d’ailleurs régulièrement de la mollesse des cordes, et le catcheur highflyer 2 Cold Scorpio avait obtenu ce soir-là des techniciens que les cordes soient tendues au maximum (afin d’effectuer des mouvements à base de rebond sur les cordes), mais ça, Foley ne le savait pas… Il exécute le Hangman et se retrouve coincé : il doit se débattre et forcer pour se libérer des câbles ! Il y parvient mais s’arrache les trois quarts de l’oreille droite dans la manœuvre ! Les médecins réussiront tant bien que mal à rattacher du cartilage rendant possible une reconstruction de l’oreille plus tard. Mais il n’en fera rien : le jour où il doit se faire opérer et reconstruire l’oreille, il a un match par équipe pour le WCW World Tag Team Championship où il est booké gagnant… il doit « trancher » et choisit de combattre, tant pis pour l’oreille.

- A la WCW, Mick demeure dans la midcard et il est snobé par les instances dirigeantes. Eric Bischoff lui fait comprendre qu’il n’a rien de mieux à offrir à Foley, lui disant qu’il n’a pas ce qu’il faut pour devenir main eventer. Blessé et frustré, Mr. Bang Bang quitte donc la compagnie de Ted Turner en 1994.

- Il pose alors ses valises à la ECW ! Là-bas, sa réputation monte en flèche grâce à des performances toujours plus « hardcore », que ce soit au micro (en révélant par exemple la liaison réelle entre Chris Candido et Tammy « Sunny » Lynn Sytch lors d’une promo) ou sur le ring (feuds avec Sabu, The Sandman, Tommy Dreamer, Raven et celui qui devient son mentor et ami, le déjà légendaire Terry Funk). Ex : lors d’un combat contre Shane Douglas, Foley encaissera la bagatelle de quarante-six coups de chaise !

- Foley s’offre une parenthèse en 1995 et rejoint l’IWF au Japon pour quelques mois en compagnie de Terry Funk. C’est là-bas qu’il acquiert définitivement le statut de Hardcore Legend en remportant le célèbre King Of The Deathmatch Tournament, un tournoi où à chaque étape, une stipulation létale différente était de mise. Avec des stipulations encourageant l’usage de battes de baseball barbelées, de panneaux barbelés, de punaises, de chaises barbelées, lits cloutés, charges de C4 (si si), bombes à retardement (si si), avec même en finale du barbelé à la place des cordes sur le ring, autant vous dire que le jeu de massacre et les hectolitres de sang étaient au rendez-vous ! Mick Foley avouera n’avoir été payé que seulement 300 pauvres dollars pour sa victoire dans ce tournoi sanglant !!! Mais l’essentiel était ailleurs : il est devenu une star internationale reconnue du catch hardcore.

- Il revient ensuite à la ECW, auréolé de ses nouveaux exploits et effectue un heelturn retentissant car son personnage de Cactus Jack prend tous les fans à contre-pied en prônant la non-violence et l’arrêt du catch hardcore ! Il s’attire une heat considérable et en rajoute encore en faisant l’apologie des fédérations rivales : la WCW et la WWF. Ce heelturn est un tel succès, que Foley est menacé dans sa vie de tous les jours, lorsqu’il n’est plus dans son personnage. La situation devient intenable… et c’est encore pire quand les fans de la ECW apprennent que Foley va très bientôt partir du côté de la WWF de Vince McMahon ! The Hardcore Legend est très réticente à l’idée d’effectuer son dernier combat à la ECW en avril 1996 face au top face Mickey Whipwreck, au vu de l’incroyable hostilité du public à son égard… mais il y va quand même ! Heureusement, tout se passera bien.

Mick Foley s’est fait malmené à la WCW, quasiment rejeté et brisé par Eric Bischoff. Il a su rebondir et se faire remarquer à la ECW, il est devenu une star au Japon. Il s’apprête à faire son entrée à la WWF, « the place to be », et compte bien prouver à Bischoff qu’il s’est trompé en ne voyant pas en lui un main eventer potentiel, le tout au format modèle géant et avec beaucoup d’ « humanité »…




Mick Foley change de peau et devient Mankind à la WWF, un garçon qui a comme qui dirait… des petits problèmes.

L’étrange Mankind est une bête de foire, une âme torturée vivant en marge de la société, qui aime les sous-sols, la violence, qui adore faire souffrir les autres mais également ressentir la douleur lui-même ! Il s’arrache les cheveux, il se berce, il hurle sans raison, il pousse des cris de porc, il appelle sa mère, il parle aux rats, il agit sans logique… Bref, Mankind a une gimmick « dark » et son arme est la Mandible Claw : il plonge ses doigts au fond de votre gorge et appuie sur un nerf qui vous paralyse de douleur et vous sombrez ! Moi qui avais à peine onze ans à l’époque, je peux vous dire que ce type me fascinait et me terrifiait à la fois, le but recherché à mon avis. La WWF n’avait jamais connu un pensionnaire aussi dément.

C’est assez naturellement que Mankind entre en rivalité avec l’autre adepte de la gimmick « dark » de la WWF en 1996 : l’Undertaker. C’est une feud de longue haleine qui s’étalera sur deux ans (avec des pauses ici et là) que les deux hommes vont se livrer. Le Deadman mettra over Foley à plusieurs reprises (à l’époque, personne n’avait autant dominé le Taker que Mankind). Le premier tournant de la storyline intervient dans le fameux Boiler Room Brawl de Summerslam 1996 où Paul Bearer, le manager et ami fidèle du Taker depuis toujours, trahit son protégé pour prendre fait et cause pour Mankind (ce dernier appellera son nouveau manager « Uncle Paul »).

Cette feud avec l’Undertaker élève Foley vers l’upcard et il a droit à un title shot face au champion de l’époque Shawn Michaels à « In Your House : Mind Games », un excellent combat, précurseur de l’Ere Attitude à venir, un match référence pour Foley (de son propre aveu, l’un des meilleurs combats de sa carrière). Néanmoins, l’Undertaker lui coûte la victoire. Cette feud exaltante se poursuit avec notamment le premier Buried Alive match de l’histoire à In Your House : Buried Alive perdu par le Deadman. Mais ce dernier gagnera les deux combats suivants (aux Survivor Series et à IYH : Revenge of the Taker) et le premier volet de cette feud qui s’achève avec la pause « forcée » prise par Paul Bearer, qui s’est fait allumé la tronche au sens propre par The Demon of Death Valley. (prétexte au retour futur de Bearer avec un nouveau look et un certain Kane sous le bras).

Mankind est donc seul… mais toujours pas dans sa tête, car on allait découvrir une nouvelle facette de ce curieux personnage. Foley est entre-temps devenu assez populaire auprès des fans. Il accorde une interview à Jim Ross et l’homme au stetson noir évoque des extraits vidéo privés de Foley datant d’il y a quinze ans dans lesquels il incarne un personnage du nom de Dude Love, un alter égo, un double qui représenterait son « moi » rêvé, un « super Mick Foley » en quelque sorte…

Parallèlement, Stone Cold et Shawn Michaels étaient tous les deux en feud avec la Hart Foundation, le clan heel anti-américain emmené par Bret Hart, ils devinrent même champions par équipe… mais voilà que, peu de temps après, le Heartbreak Kid se blessait gravement ! Steve Austin se retrouvait donc sans partenaire… Mankind offrit ses services au Texas Rattlesnake, seulement pour essuyer un refus brutal, Austin disant qu’il recherchait un partenaire et pas une bête de foire, avant de se résigner à défendre les ceintures seul face à Owen Hart et au British Bulldog. Le soir du combat, Austin lutte donc dans ce qui s’apparente à un match handicap… quand cet homme débarque et lui sauve la mise !

Dude Love et Stone Cold deviennent coéquipiers ! The Dude aide Austin dans sa lutte contre la Hart Foundation jusqu’à ce que Stone Cold soit sérieusement blessé à la nuque dans un match face à Owen Hart à Summerslam 1997, forçant les deux compères à abandonner les ceintures… Dude Love enchaine avec une rivalité face à Triple H qui conduira Mick Foley à ramener un autre de ses personnages sur le devant de la scène…

https://www.dailymotion.com/video/x4s4v6_cactus-jack-vs-hunter-hearst-helmsl_sport?search_algo=2

Cactus Jack est de retour ! Vive la schizophrénie ! Enfin il ne sera pas là très longtemps : juste le temps de réaliser un vieux rêve de Foley. En effet, Terry Funk arrive à la WWF pour un petit run en incarnant son alter égo Chainsaw Charlie ! Cactus et Chainsaw ont une petite feud avec les New Age Outlaws et gagnent même le titre par équipe à Wrestlemania XIV dans un Dumpster match, avant que Vince McMahon ne leur retire les ceintures pour les redonner aux ex-champions sous un faux prétexte le lendemain à Raw…

Peu après, le 6 avril 1998, Cactus Jack effectue un heelturn en disant que les fans ne le verront plus car ils ne l’apprécient pas à sa juste valeur et qu’ils n’ont d’yeux que pour Stone Cold, le nouveau champion de la WWF (titre gagné à WM XIV comme vous le savez). Vince va alors partir en croisade contre Austin, ne supportant pas l’idée que Stone Cold soit le champion. Et c’est Dude Love version heel qui sera chargé de récupérer la ceinture. Il échouera une première fois à Unforgiven, puis une deuxième fois à Over The Edge, l’Undertaker venant prêter main forte à Austin alors que Vince avait organisé un match qui sentait le screwjob (Shane étant l’arbitre, Gerald Brisco le time-keeper et Pat Patterson l’annonceur). Dude Love fut « viré » par Vince à cause de cet échec le lendemain à Raw…

Mais plus tard lors de la même soirée, c’est Mankind qui faisait son retour à la WWF avec un nouveau look (chemise blanche sans manche et cravate) et une mission : se venger de l’Undertaker ! Ce second volet de la feud déboucha sur l’un des combats les plus fous et les plus célèbres de tous les temps : le Hell In A Cell match du King of the Ring 1998 ! Oui, c’est avec ce match que Mick Foley est devenu très célèbre et est définitivement entré dans la légende. Tout fan de catch qui se respecte a vu ce combat d’anthologie, qui fut témoin de toute l’étendue de la folie d’un homme ! (https://www.youtube.com/watch?v=tHlhQI2NaeI)

Foley avait prévenu Vince qu’il ferait quelque chose de très spécial ce soir-là… il n’a pas menti : une première chute de cinq mètres de haut du sommet de la cage pour s’écraser sur la table des commentateurs hispanophones, ce qui surprit tout le monde, Howard Finkel le premier (son visage exprimant une épouvante bien réelle), et surtout Jim Ross qui prononça la tirade culte : « Good God almighty ! Good God almighty ! That killed him ! As God as my witness, he’s broken in half ! Somebody stop the damn match ! » Foley avait une maigre protection sous ses vêtements et il s’était préparé à ce bump avec l’aide de Terry Funk… en revanche, il ne s’était pas préparé au deuxième ! Ainsi, le match se poursuit et les deux hommes sont à nouveau au sommet de la structure, Mick a ramené une chaise… mais il encaisse un Chokeslam du Taker ! Mais là où le « grillage » devait seulement s’affaisser, tout un pan du toit a cédé sous l’impact et Foley le traverse pour s’écraser violemment dans le ring ! Comme si ça ne suffisait pas, la chaise qu’il avait avec lui l’accompagna dans sa chute et, à la réception, le heurta à la tête lui faisant sauter une dent !

Le simple fait que Foley ne se soit pas tué sur le coup est un petit miracle, il faut croire que son exceptionnelle faculté à encaisser les coups et les bumps en tout genre lui a sauvé la vie. C’est après avoir été inconscient un moment et en « pilote automatique » qu’il termine le match alors qu’il a la bouche en sang, des blessures internes, des côtes cassées et une commotion cérébrale. Après le match, Vince lui ordonne de ne plus jamais faire ce genre de cascade et il a une conversation téléphonique houleuse avec sa femme… Dans son livre Have A Nice Day, Foley raconte que lors de l’examen médical d’après-match, ayant subi une perte de mémoire immédiate à cause des différents bumps, il demande à l’Undertaker s’il a bien pensé à utiliser les punaises durant le combat. Ce à quoi le Deadman, effaré, répond : « Regarde ton bras, Mick ! » Foley constate alors qu’il a des punaises plantées dans le bras…

Après ce combat, Foley commence son ascension vers le main event. Il sent alors que la clé du succès consiste à modifier le personnage de Mankind afin de mieux toucher le cœur des fans. Durant l’été 1998, alors qu’il forme une équipe avec Kane, il commence à faire évoluer son personnage : Mankind, le fou dangereux à l’âme torturée devient le détraqué niais et lourdaud mais à l’humour décalé ravageur ! Après Summerslam 1998 où Kane le trahit, leur faisant perdre le titre par équipe, Mankind débute une étrange relation avec Vince McMahon. En effet, Mankind décide de devenir l’ami du président haï, le suivant partout et cherchant à lui faire plaisir par-dessus tout… au grand dam de VKM. Dans un épisode de Raw de septembre resté célèbre, alors que Vince est hospitalisé à cause de blessures infligées par Kane et l’Undertaker (in kayfabe), Mankind lui rend visite et tente de le dérider par tous les moyens. A un moment donné, alors que Vince est de plus en plus irrité, Mankind sort alors une chaussette marionnette qu’il appelle Mr. Socko… une star est née !

Alors que c’était censé n’être qu’un « one shot », Mr. Socko fut réclamé par les fans et Foley commença un nouveau rituel lors de ses matchs : il sort la chaussette de son collant, la passe à sa main et applique la Mandible Claw à ses adversaires avec. Le succès de Mr. Socko tient aussi aux commentaires de Jerry Lawler qui disait que cette chaussette était sale, puante, suintante et répugnante à chaque fois que Mankind la sortait. En outre, Vince commença à être étrangement aimable et avenant avec le gentil maniaque, notamment en lui offrant le tout nouveau WWF Hardcore Championship. De son côté, Mrs. Foley’s Baby Boy apprécie toutes ses marques d’attention de la part de Vince qu’il voit comme une figure paternelle…

Mais Vince a un plan ! Alors que les Survivor Series 1998 vont avoir lieu, le WWF Championship est toujours vacant et un tournoi est donc organisé (pour plus de détails, voir la chronique FWT relative à The Rock). Tout est alors fait en sorte pour que Mankind soit favorisé et accède à la finale du tournoi, aidé par Vince et ses hommes. Au contraire, Stone Cold et The Rock, voient McMahon leur mettre des bâtons dans les roues. Finalement, Stone Cold se fait arnaquer par Shane McMahon et est éliminé, en revanche, The Rock rejoint Mankind pour la grande finale… alors que tout le monde pensait que Vince allait aider Mick à remporter le titre suprême, c’est un énorme screwjob qui a lieu sur sa personne ! En « hommage » au Montreal Screwjob (qui avait eu lieu un an plus tôt), Vince faisait sonner la cloche alors que le Great One portait le Sharpshooter sur Mankind sans que celui-ci n’ait abandonné !

Le plan de Vince avait fonctionné à la perfection et nous avions là un quasi « double turn » : The Rock devenait heel et remportait au passage son premier titre mondial, devenant The Corporate Champion… tandis que la victime innocente de la machination devenait un face pur et dur. L’une des plus grandes rivalités de l’histoire de la WWF/WWE pouvait alors débuter entre Mankind et The Rock ! The Hardcore Legend criait vengeance.

Après des semaines à essayer de rendre la monnaie de sa pièce à Vince et à sa Corporation, sa nouvelle faction, Mankind obtient un title shot à In Your House Rockbottom où Foley bat The Rock par KO après que le Great One se soit évanoui des suites de la Mandible Claw. Mr. Bang Bang est le nouveau champion ! NON ! Vince intervient et explique que le titre ne peut changer de main suite à un KO, le Brahma Bull demeure le champion, ce qui attise la colère des fans et la haine de Foley envers The Rock !

The Corporation du maléfique VKM fait l’unanimité contre elle désormais et Mankind est soutenu par les ennemis de celle-ci : Degeneration X. Après des semaines de lutte pour se venger de Vince, du Great One, de Shane et des autres, Mankind obtient un nouveau title shot à Raw le 4 janvier 1999, il n’y aura pas de disqualification, ni de décompte à l’extérieur, donnant tout loisir aux membres de la Corporation d’intervenir durant la rencontre, et donc rendant très compliquée la tâche de Mankind… La troisième fois sera-t-elle la bonne pour Mrs. Foley’s Baby Boy ? Les fans désirent plus que tout voir Mick remporter le titre et mettre à mal Vince et sa bande….

https://www.dailymotion.com/video/x5x6c1_mankind-wins-the-world-title-pt-3_news
https://www.dailymotion.com/video/x5x6dv_mankind-wins-the-world-title-pt-4_news

C’est fait ! Mick Foley est officiellement le nouveau WWF champion ! Il touche enfin au titre mondial, au titre suprême, celui qu’on disait qu’il ne gagnerait jamais ! Foley est sur le toit du monde ! Il a réalisé son rêve ! Quelle belle histoire ! Certes, il aura fallu l’aide de DX (notamment Billy Gunn qui se jette sur Ken Shamrock) et surtout l’intervention décisive de Stone Cold (l’une des plus grosses pops de l’histoire), qui se venge ainsi de McMahon, mais l’essentiel est là : Mick Foley, le gamin de Setauket, celui qui dormait dans la poubelle qui lui servait de voiture, celui qui a sacrifié son corps, celui qui n’était certainement pas le meilleur lutteur au monde du point de vue technique, est enfin récompensé de toutes ses années de galère et d’efforts, il est le nouveau World Wrestling Federation champion !

Mais ce premier titre de Foley a une toute autre dimension également. C’est un moment historique et déterminant de l’histoire du catch américain. En effet, ce moment signe le début de la fin pour la WCW et dessine la future victoire de la WWF dans les Monday Night Wars, cette guerre des audiences (et pas que) entre les deux compagnies rivales. Ce qu’il faut savoir, c’est que depuis presque deux ans, la World Championship Wrestling battait régulièrement la World Wrestling Federation à l’audimat le lundi soir. Nitro faisait de meilleurs scores que Raw, en grande partie grâce à la storyline nWo et à sa division cruiserweight (pas étonnant avec des lutteurs comme Malenko, Eddie Guerrero, Benoit, Jericho, Mysterio, Ultimo Dragon, Billy Kidman… etc). La WCW et son président exécutif Eric Bischoff tiraient énormément de fierté du fait que Nitro était un show diffusé en direct, alors que Raw à l’époque était un show enregistré. La majeure partie du temps, Bischoff, exploitant cette faiblesse, ordonnait aux commentateurs de Nitro (Tony Schiavone, Mike Tenay, Bobby Heenan et Larry Zbyszko) de donner en début d’émission les résultats des matchs qui allaient avoir lieu à Raw le soir-même. Ceci était censé décourager les spectateurs de Nitro de zapper en faveur de la concurrence…

Et le 4 janvier 1999, au tout début de WCW Monday Nitro, Bischoff ordonne comme de coutume à ses commentateurs de divulguer les résultats complets du show concurrent. Tony Schiavone s’exécute et annonce donc que Mick Foley va battre The Rock et devenir le nouveau champion de la WWF ce soir. (A l’époque, il est très rare de voir un titre majeur changer de propriétaire à la télévision gratuite, cela ne se fait qu’en pay-per-view exclusivement ou presque. Eh bien il s’agira d’un coup de génie de VKM.) Le pauvre Schiavone, révèle donc l’issue du main event de Raw et ajoute sur un ton ironico-sarcastique : « That will put a lot of butts in the seats ! » (en gros : des tas de derrières vont remplir les sièges, ça va intéresser du monde) Le commentateur de la WCW allait apprendre bientôt qu’il s’était lourdement trompé !

En effet, la WCW se prit ce soir-là un gigantesque retour de flamme. Nitro présentait en Main Event le tristement célèbre épisode de la « Pichenette Maudite » (Fingerpoke of Doom), avec une parodie de match de championnat entre Hollywood Hulk Hogan, leader de la nWo originelle (heel), et Kevin Nash, champion du monde poids lourds de la WCW et leader de la nWo Wolfpac (face) : la cloche sonne, les deux hommes se toisent, Hogan donne alors une petite pichenette sur le buste de Nash, ce dernier se laisse tomber au sol, Hogan fait le tombé, 1-2-3, Hogan redevient champion et la nWo redevient une seule et même entité heel, tout ce beau monde s’est rabiboché (malgré une grosse année de feud et de déchirement). Face à cette farce douteuse, la WWF propose la victoire de Foley, un feel good moment attendu depuis longtemps par les fans… Ce fut donc un raz-de-marée et énormément de spectateurs de Nitro se précipitèrent sur leur télécommande et changèrent de chaîne pour assister au sacre de Mick Foley, permettant à la WWF et à Raw de battre nettement Nitro aux ratings pour la première fois depuis très longtemps, amorçant le déclin de la WCW et le net regain de forme de la WWF avec le dénouement que l’on sait en 2001.

Ainsi, Mick Foley fut l’instrument d’un tournant déterminant dans les Monday Night Wars. Après le 4 janvier 1999, de nombreuses pancartes scandant « Mick Foley has put my butt in this seat » (Mick Foley a mis mon derrière dans ce siège) commencèrent à fleurir dans le public des shows de la WWF. Finalement, Mick Foley s’est totalement vengé d’Eric Bischoff et de la WCW : la vengeance est un plat qui se mange froid.

La carrière de catcheur de Foley pouvait alors connaître son apogée avec cette feud face au Rock qui allait perdurer jusqu’à se transformer en amitié avec la formation de leur duo, The Rock ‘n’ Sock Connection. C’est avec The Rock qu’il est impliqué dans le segment ayant obtenu la plus forte audience de l’histoire de Raw : This is Your Life. Puis Foley connaitra une feud dantesque avec Triple H très riche en combats de légende (Royal Rumble, No Way Out et WM 2000). Il y aura ensuite le succès littéraire de Have A Nice Day (qui entrainera d’autres livres autobiographiques mais également de fiction), sa retraite des rings pendant presque quatre ans de mi-2000 à 2003, pendant laquelle il jouera le rôle de Commissioner de la WWF (=GM), puis des apparitions sporadiques en tant qu’arbitre spécial, ou pour des feuds de courte durée face à Randy Orton, Ric Flair ou Edge, avant un bref passage à la table des commentaires de Smackdown. Il partira ensuite à la TNA où il tiendra le rôle de figure d’autorité quelques mois avant de retrouver les rings et gagner le titre majeur de la compagnie, puis il sera mis de côté et reviendra même à la WWE pour jouer les commodités. Il est actuellement en tournée avec un spectacle de « stand-up ».

Catcheur aux trois personnalités, légende du catch hardcore, auteur, acteur (films de série B et Z, nombreuses participations à des séries TV), militant démocrate, engagé dans des associations pour la protection de l’enfance, personnage attachant, fou furieux ou génie, Mick Foley est unique en son genre et ne laisse pas indifférent.

La sonnerie retentit dans la salle, les Freaks se lèvent et les bruits de chaise créent un brouhaha…

Tomb : Voilà, c’était le premier titre mondial de Mick Foley. J’espère que ça vous a plu. La prochaine fois, je vous parlerai de…

Clown Bastard : Hey ! Y a Nak qui revient à lui !

Tombstone : J’ai des punaises…

Les Freaks : OUAIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIS !