Cette année, John Cena fête le vingtième anniversaire de ses débuts à SmackDown. Le 27 juin 2002, les fans de la WWE découvraient celui qui allait devenir une légende. Ce soir là, l’ancien OVW Heavyweight Champion faisait une grosse impression en faisant un match compétitif contre Kurt Angle, ce qui lui vaudra une poignée de main avec nul autre que The Undertaker. 20 ans plus tard il y’a des tonnes d’histoires à raconter, des tonnes de souvenir à convoquer, des tonnes de moments à se remémorer, mais moi, il y en a un qui m’a plus marqué et que je considère comme un tournant majeur dans sa carrière, c’est son année 2015 et son run comme WWE United States Champion.

De tous les grands moments de sa carrière, de ses 16 règnes de champion du monde, ses rivalités avec JBL, Edge, Randy Orton, etc., c’est vraiment ça que tu retiens Styles ? Et bien oui !
Je trouve que cette partie de sa carrière est l’une des plus impactantes sur son image auprès du public, sur son statut et donc sur sa légende.

Petite remise dans le contexte de l’époque. En 2015, John Cena est un main-eventer depuis déjà 10 ans, à ce moment-là il a déjà été 15 fois champion du monde, à un petit règne du record officiel de Ric Flair. Mais surtout, à cette époque, les « Cena Sucks » prennent le pas sur les « Let’s go Cena ». Big Match John énerve les fans, il lui est reproché de gagner les matchs qu’il doit perdre, de prendre trop de place en haut de la carte et surtout de freiner des progressions ou de gâcher des carrières. Rien que son année 2014 est un exemple de ce qui a tourné les fans contre celui qui fût un héros. À WrestleMania XXX, il bat Bray Wyatt, ce qui est considéré encore aujourd’hui comme un évènement dévastateur pour la carrière et la progression de Bray Wyatt puisque c’était sa première défaite importante et que le public voulait le voir gagner.
À Money In The Bank, un ladder match pour le WWE World Heavyweight Championship laissé vacant par Daniel Bryan est organisé, et c’est John Cena qui repart avec l’or. John Cena représente tout l’inverse de ce que représente Daniel Bryan et cette décision sonne comme un refus de réellement évoluer.
Et pour finir l’année, Cena mène la rébellion contre The Authority à Survivor Series et leur prend le pouvoir le temps de quelques semaines.

À cette époque donc, le public se lasse de John Cena qui semble ne jamais pouvoir être autre chose que le centre de l’attention. Forcément qu’il monopolise une partie de l’attention, c’est la plus grosse star de la décennie à la WWE, il est connu et admiré dans le monde entier, mais il ne faut pas que le public s’en lasse. Et en 2015, Cena va retrouver le respect du public.

À WrestleMania 31, John Cena bat Rusev et devient WWE United States Champion pour la 4ème fois de sa carrière. Entre mars et octobre, rien qu’à Monday Night Raw, John Cena a défendu son WWE United States Championship 16 fois contre une grande variété d’adversaire. Entre temps il l’a perdu contre Seth Rollins à Summerslam 2015, alors qu’il combattait dans ce même match pour le WWE World Heavyweight Championship. Toutes les semaines, le public attendais que John Cena se présente sur le ring et annonce l’ouverture de son Open Challenge pour découvrir qui allait répondre à l’invitation et tenter sa chance. De Dean Ambrose à Dolph Ziegler en passant par Cesaro, Bray Wyatt, Zack Ryder, Stardust mais surtout Sami Zayn qui a eu le luxe d’être présenté devant le public de Montreal par Bret Hart, John Cena a donné l’opportunité à de nombreux catcheurs de la mid-card et de NXT de se faire un nom, de se faire une image à la WWE avec un match compétitif à la télévision devant plus de 4 millions de téléspectateurs (ça a bien baissé dites donc). A l’époque il est même le premier à feuder avec Kevin Owens, alors NXT Champion, Owens qui battra Cena lors de son premier match en PPV.

On voit cette année-là un grand changement, un John Cena qu’on n’avait pas encore vu par le passé, un John Cena qui est généreux, qui prend moins de place, qui fait briller les autres. En quelques mois, John Cena a fait un travail monstrueux qui l’a fait grandir lui, qui a fait grandir ses adversaire et qui a rendu du prestige au titre qu’il a fièrement défendu. Et ça va me permettre de parler d’un principe qui est devenu trop rare dans le catch aujourd’hui, le fait de « mettre over ». Attention à l’utilisation du terme « over », c’est un terme galvaudé que le public utilise à tort et à travers, mais là on ne va pas parler du fait « d’être over » mais de « mettre over ». « Mettre over » c’est le fait de crédibiliser son adversaire par ce qu’on va lui donner, par son statut, etc. En l’occurence, disputer un match compétitif contre John Cena à Raw ou en PPV, même s’il est perdu, ça indique au public qu’on est capable de le faire et donc ça donne une certaine forme de crédibilité. Quand Seth Rollins arrive à défendre son titre mondial et remporte le titre US par la même occasion, il devient un main-eventer confirmé. Quand Kevin Owens débarque et bat Cena, ça annonce de grandes choses, quand Sami Zayn débute dans sa ville et pousse Cena dans ses dernier retranchements, ça montre qu’il a quelque chose de spécial. Attention, un match ne fait pas une carrière, il faut capitaliser sur le momentum, mais ce momentum il faut le créer, et ça, John Cena l’a fait en 2015. Il a fait en 2015 pour plusieurs superstars ce qu'a fait Kurt Angle pour lui en 2002.

Et puis, Cena a rendu du prestige au WWE United States Championship, parce que pendant des mois, il a instauré un esprit de compétition, il a rendu le titre important, le public attendait le match pour le titre US toutes les semaines et attendait la surprise de l’adversaire du jour. Qui va répondre au défi ? Un retour surprise ? Un début en provenance d’NXT ? Est-ce que l’adversaire de la semaine va réussir ? Pendant cette période, le titre US était important, parce que John Cena l’a rendu important.

On peut raconter beaucoup de choses sur John Cena, on peut critiquer son travail, en positif comme en négatif. En 20 ans il y’a tant de choses qui ont marqué le public. Moi c’est ces nombreux mois où John Cena s’est fait à la fois plus petit et plus grand. Et vous, quelle période, quel souvenir vous a le plus marqué dans la carrière de John Cena ?

Je crois que cette période où John Cena était champion US avait été unanimement appréciée sur le forum. D'abord parce que ça avait produit de très bons matchs avec des adversaires variés (j'avais été scotché par le match contre Cesaro à Raw), et parce qu'on voyait Cena sortir de sa routine sur le ring.

Si je me souviens bien, c'était l'époque où la WWE essayait de profiler Reigns comme nouveau top face en Main Event (avec un succès pour le moins mitigé), et c'est aussi pour ça que Cena a pu changer de créneau. Le Main Event ne s'est pas amélioré avec le départ de Cena, mais le mid-upcard en a vraiment bénéficié !

Mon meilleur souvenir de Cena ? Personnellement j'avais adoré le "match" cinématique avec Wyatt à Wrestlemania Covid, mais je sais que ça divise énormément.

Pour évoquer un souvenir de Cena, je partage cette vidéo récente où il commente son premier match en main roster. C'est très instructif de voir à quoi il réagit. En regardant ce match sur un écran, je l'avais trouvé assez chouette, justement parce qu'il y avait beaucoup d'action plutôt rapide. Mais aujourd'hui, Cena remarque que le public live n'était pas particulièrement intéressé : selon lui, il aurait dû au contraire aller plus lentement pour prendre le temps d'impliquer les spectateurs qui ne le connaissaient pas encore. Il évoque aussi l'incohérence de son attitude "Roughless aggression". Très intéressant et étonnamment hors-kayfabe.

jambon a écrit:

Si je me souviens bien, c'était l'époque où la WWE essayait de profiler Reigns comme nouveau top face en Main Event (avec un succès pour le moins mitigé), et c'est aussi pour ça que Cena a pu changer de créneau. Le Main Event ne s'est pas amélioré avec le départ de Cena, mais le mid-upcard en a vraiment bénéficié !

Carrément même, on le sentait déjà avant la fin du Shield où il est déjà mis très en avant par rapport à Rollins et Ambrose. On sentais la douille du nouveau John Cena arriver à 150 kilomètres.

jambon a écrit:

Mon meilleur souvenir de Cena ? Personnellement j'avais adoré le "match" cinématique avec Wyatt à Wrestlemania Covid, mais je sais que ça divise énormément.

Je confirme, ça divise.

jambon a écrit:

Pour évoquer un souvenir de Cena, je partage cette vidéo récente où il commente son premier match en main roster. C'est très instructif de voir à quoi il réagit. En regardant ce match sur un écran, je l'avais trouvé assez chouette, justement parce qu'il y avait beaucoup d'action plutôt rapide. Mais aujourd'hui, Cena remarque que le public live n'était pas particulièrement intéressé : selon lui, il aurait dû au contraire aller plus lentement pour prendre le temps d'impliquer les spectateurs qui ne le connaissaient pas encore. Il évoque aussi l'incohérence de son attitude "Ruthless aggression". Très intéressant et étonnamment hors-kayfabe.

Il est revenu là-dessus plus en détail dans la série documentaire "Ruthless Aggression" sur le WWE Network. En fait je dirais pas que le problème est le match en lui-même, parce qu'au final le public allait associer son visage à un gars qui a donner du fil à retordre à Kurt Angle, et puis il y'a la poignée de main avec le Taker qui lui demande son nom. Perso je trouve que son début à SmackDown n'aurait pas pu être bien mieux, ça fait le taff'. Je pense comme il le dit dans le documentaire que c'est ce qui a suivi qui constitue l'échec de son run initial. Après ça il est était le gars sans gimmick qui changeait de couleur de calbute en fonction de la ville où il allait, par rapport aux franchises de NFL, NBA, etc. Et derrière il a faillit se faire virer, parce que le public s'en foutait de lui. Et on parle d'un gars que Jim Cornette décrivait comme un gars avec énormément de personnalité à OVW parce que, je cite, "il peut faire un promi comme s'il était à la tv depuis 15 ans"
Et d'ailleurs l'anecdote sur ce qui a sauvé sa carrière est géniale. Il allait se faire dégager fin 2002, et un jour dans un bus, il entend Rey Mysterio et d'autres gars au fond entrain de rapper, il a levé ses miches, a lâché un freestyle, Stephanie McMahon lui a demandé s'il voulait le faire à la télé au prochain SmackDown, et ainsi est né le Doctor of Thuganomics.

C’est surtout la période où John Cena commençait à être débridé dans son rôle de babyface et il faut reconnaître que c’est un des meilleurs catcheurs de l’histoire depuis qu’il est en roue libre (c’était déjà le cas mais il était limité par son rôle de poster-boy de la WWE pour des raisons évidentes).

Samoan a écrit:

C’est surtout la période où John Cena commençait à être débridé dans son rôle de babyface et il faut reconnaître que c’est un des meilleurs catcheurs de l’histoire depuis qu’il est en roue libre (c’était déjà le cas mais il était limité par son rôle de poster-boy de la WWE pour des raisons évidentes).

J'avais pensé à cet angle là, mais maintenant que j'y pense c'est vrai que c'était une étape importante dans sa manière de se mettre en scène.

Dans le genre roue libre je retiendrai toujours la fameuse promo avec Reigns en 2017 ou Reigns oublie son texte et n'arrive pas à improviser et Cena l'a terminé en mode full shoot. Le gars avait acquis ce statut d'intouchable qui peut faire ce qu'il veut et il s'est dit qu'il allait trasher le nouveau poster boy.
Déjà tout le long de sa promo il était en mode shoot à coups de "cheap-ass corporately created John Cena bootleg", etc.

Lord Styles a écrit:

jambon a écrit:

Pour évoquer un souvenir de Cena, je partage cette vidéo récente où il commente son premier match en main roster. C'est très instructif de voir à quoi il réagit. En regardant ce match sur un écran, je l'avais trouvé assez chouette, justement parce qu'il y avait beaucoup d'action plutôt rapide. Mais aujourd'hui, Cena remarque que le public live n'était pas particulièrement intéressé : selon lui, il aurait dû au contraire aller plus lentement pour prendre le temps d'impliquer les spectateurs qui ne le connaissaient pas encore. Il évoque aussi l'incohérence de son attitude "Ruthless aggression". Très intéressant et étonnamment hors-kayfabe.

Il est revenu là-dessus plus en détail dans la série documentaire "Ruthless Aggression" sur le WWE Network. En fait je dirais pas que le problème est le match en lui-même, parce qu'au final le public allait associer son visage à un gars qui a donner du fil à retordre à Kurt Angle, et puis il y'a la poignée de main avec le Taker qui lui demande son nom. Perso je trouve que son début à SmackDown n'aurait pas pu être bien mieux, ça fait le taff'.

Oui, c'était un début prestigieux en termes de mise en avant et de scénario, avec un match compétitif contre une top-star établie et un adoubement on-screen du Taker. Mais ça, c'est un point sur lequel il faut plutôt remercier les bookers. Pour ce qui est de Cena, sa part du travail était de faire un match qui intéresse le public, et il remarque qu'il aurait pu mieux le faire. Par la suite, il a vraiment bien appris à impliquer la foule en cours de match, par ses interactions, ses regards, son teasing des moves, sa construction des matchs, sa maîtrise du rythme. Mais tous ces éléments n'étaient pas encore au point à ce moment-là.

Comme tu le dis, ça n'a pas vraiment eu de conséquences, parce que ce qu'on a retenu, c'est le prestige du booking plutôt que le match lui-même. Et comme je l'ai dit, en voyant le match télévisé, je l'avais trouvé bien. Mais apparemment le public en live l'a vécu différemment et après 20 ans, Cena a le recul de se demander pourquoi.

(merci d'avoir poussé le chic jusqu'à corriger "Ruthless" dans mon propre message)

jambon a écrit:

Oui, c'était un début prestigieux en termes de mise en avant et de scénario, avec un match compétitif contre une top-star établie et un adoubement on-screen du Taker. Mais ça, c'est un point sur lequel il faut plutôt remercier les bookers. Pour ce qui est de Cena, sa part du travail était de faire un match qui intéresse le public, et il remarque qu'il aurait pu mieux le faire. Par la suite, il a vraiment bien appris à impliquer la foule en cours de match, par ses interactions, ses regards, son teasing des moves, sa construction des matchs, sa maîtrise du rythme. Mais tous ces éléments n'étaient pas encore au point à ce moment-là.

Comme tu le dis, ça n'a pas vraiment eu de conséquences, parce que ce qu'on a retenu, c'est le prestige du booking plutôt que le match lui-même. Et comme je l'ai dit, en voyant le match télévisé, je l'avais trouvé bien. Mais apparemment le public en live l'a vécu différemment et après 20 ans, Cena a le recul de se demander pourquoi.

Tout à fait, le fait qu'il émette des réserves sur sa performance 20 ans plus tard, c'est dû au fait qu'il a eu le temps justement d'apprendre à connecter avec le public, et c'est quelque chose qui s'apprend avec le temps. A cette époque là il n'a qu'un an d'expérience significative devant des foules pas très grandes. En y réfléchissant bien, je pense qu'un rookie avec si peu de direction de personnage ne pouvait pas faire mieux.

Il n'avait pas de direction autre ce soir là que "petit, ce soir tu débarques, tu dis ton nom, "Ruthless Aggression", tu mets une tarte à Angle et c'est parti", tout ça ne disait pas qui il était. A OVW il avait son gimmick, sa personnalité, il savait dans quelle direction précise aller, ce soir là il doit trouver un moyen de comprendre qui est "John Cena", il sait qui est "The Prototype", mais pas qui est John Cena.
Pour comparer avec un autre membre de la génération dorée de OVW qui a débuté en 2002, Brock Lesnar dès qu'il débute, il sait qui il est et qu'est-ce qui le différencie des autres. Randy Orton a mis du temps à connecter avec le public parce que lui-même ne savait pas vraiment qui il était avant son run avec Evolution et surtout avant qu'il ne devienne le "Legend Killer".

Parce que ce qui se passe dans le ring, le comportement in-ring d'un catcheur est lié à la personnalité qu'il doit faire paraître. Par exemple si on prend Roman Reigns, avant il avait un style in-ring très stéréotypé, un peu à l'image de son gimmick, dès qu'il a tourné heel et qu'il est devenu le "Tribal Chief", son style a changé, ses matchs sont devenus plus intéressants.